1. Causes prévues par l’article 341 du Code de procédure civile
Aux termes de l'article 341 du Code de procédure civile: “La récusation d'un juge n'est admise que pour les causes déterminées par la loi”.
Comme il est dit à l'article L.731-1 du Code de l'organisation judiciaire (devenu COJ, art. L.111-6):
«Sauf dispositions particulières à certaines juridictions la récusation d'un juge peut être demandée:
1° Si lui-même ou son conjoint a un intérêt personnel à la contestation;
2° Si lui-même ou son conjoint est créancier, débiteur, héritier présomptif ou donataire de l'une des parties;
3° Si lui-même ou son conjoint est parent ou allié de l'une des parties ou de son conjoint jusqu'au quatrième degré inclusivement;
4° S'il y a eu ou s'il y a procès entre lui ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint;
5° S'il a précédemment connu de l'affaire comme juge ou comme arbitre ou s'il a conseillé l'une des parties;
6° Si le juge ou son conjoint est chargé d'administrer les biens de l'une des parties;
7° S'il existe un lien de subordination entre le juge ou son conjoint et l'une des parties ou son conjoint;
8° S'il y a amitié ou inimitié notoire entre le juge et l'une des parties.»
La simple lecture de cet article permet de tirer d’ores et déjà deux enseignements:
- D’une part, les liens entre le juge et une partie peuvent être simplement indirects;
- D’autre part, les causes de récusation ne sont pas qu’économiques. L’esprit du texte est de veiller à l’indépendance intellectuelle des magistrats qui consiste à tenir à distance les «préjugés» tant décriés par René Descartes dans son discours de la méthode.
Dans son arrêt de principe du 28 avril 1998, la Cour de cassation a considéré que
l'article 341, qui prévoit huit cas de récusation, "n'épuise pas nécessairement l'exigence d'impartialité requise de toute juridiction. Viole donc l'article6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'arrêt qui écarte l'examen de la demande de récusation sur le fondement de cet article au motif que le droit français assure le respect de l'impartialité des juridictions”
«Attendu qu'en se déterminant par ces motifs alors que l'article 341 précité, qui prévoit limitativement huit cas de récusation, n'épuise pas nécessairement l'exigence d'impartialité requise de toute juridiction, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé [...].
Dans son arrêt du 5 décembre 2002, la Cour de cassation a étendu cette jurisprudence aux cas de récusation d’un expert.
La jurisprudence de la européenne des droits de l'homme a permis de mettre en évidence l'impartialité subjective et l'impartialité objective:
- Impartialité subjective – Elle conduit à vérifier que les juges (ou les experts) n'ont pas de préjugé ou de parti pris sur l'affaire dont ils ont à connaître. La preuve de la partialité subjective doit être faite par des moyens objectifs.
- Impartialité objective – Elle conduit, pour sa part, à contrôler structurellement la mise en œuvre de l'impartialité de la juridiction. Il s'agit ici de vérifier le principe anglo-saxon de l'apparence: "justice must not only be done: it must also be seen to be done".
Dans ces conditions, “doit se récuser tout juge dont on peut légitimement craindre un manque d'impartialité”. Ainsi, l'impartialité objective peut être altérée de deux façons:
- par la connaissance de liens objectifs (familiaux, administratifs, sociaux) entre le juge et l'une des parties, que ce lien soit direct ou indirect;
- par la reconnaissance que des "considérations de caractère fonctionnel et organique" mettent le juge en situation de partialité.