Christophe Leguevaques Avocat barreau Paris-Toulouse
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Une curieuse disposition à effet rétroactif de la loi Justice pour le 21ème siècle...


Philippe ALLIAUME est un homme complet. Son parcours l'a mené de la DSI (Ingénieur ECP à l'origine) à la banque, à la presse, au redressement de sociétés. Longtemps juge consulaire au Tribunal de Commerce de Bobigny, il achève, à plus de 50 ans, ses études pour devenir avocat.

Il a pris la tête d’une croisade judiciaire contre une disposition de la loi Justice pour le 21ème siècle qui lui parait contraire aux principes du droit européen.

INTERVIEW SANS CONCESSION



Vous avez lancé une croisade contre la loi J21 en raison d'une disposition contraire au droit européen, pouvez-vous nous présenter la mesure visée et les principaux arguments évoqués ?
La loi dite justice du XXIème siècle a décidé, dans un texte avec effet rétroactif, qu'un juge consulaire devait quitter ses fonctions passer l’âge fatidique de 75 ans. Passe encore qu'on mette une limite d'âge à l'élection, mais qu'on décide de démettre brutalement de leurs mandats des juges qui ont été élu alors que la disposition n'était pas en vigueur, cela fait un peu peur. Démettre un juge de son siège, c'est une sanction. Quand l'un des pouvoirs commence à sanctionner l'autre, la démocratie tousse.
 
En outre, le droit européen proscrit la mise en place de limite d'âges professionnelles quand elles ne sont pas justifiées et proportionnées et la France s'est abstenue de justifier de la nécessité, d'autant plus qu'un juge bénévole est souvent un pré retraité, et qu'il lui est difficile de faire ses 4 mandats de 4 ans entre 62 et 75 ans.
 
Comment expliquez-vous une telle mesure ?
Le mystère de l'écriture des textes entre haute fonction publique, politique et lobbies est toujours un sujet d'étonnement. Ce texte malencontreux semble issu d'une tentative de réécrire le texte primitif de la chancellerie sous la plume de la conférence des juges consulaires. En termes de droit, ça pourrait s'appeler passer du code Charybde au code Scylla.
 
Êtes-vous seul, isolé dans vos démarches ?
Oh que non. Je ne suis pas personnellement concerné, mais j'ai trouvé cette disposition suffisamment choquante pour justifier une mobilisation. Plusieurs centaines de juges, environ 1/10 des effectifs consulaires ont été concernés. Le président d'un grand tribunal, très actif pour la défense internationale de Paris place de droit a été lui aussi mis brutalement au rebut.
 
Pensez-vous que cela va intéresser les juridictions européennes ?
A une exception près, les juridictions judiciaires et administratives saisies, Conseil d'Etat inclus, ont traité le sujet par le mépris, ou en répondant à côté de la question. Le Conseil constitutionnel, présidé par un juge constitutionnel qui franchira le seuil des 75 ans à la moitié de son mandat s'est déclaré peu intéressé. La commission du loi du parlement saisie à deux reprises a feint de ne pas comprendre la question. Le parlement saisi par voie de pétition n'a pas été plus performant.
 
En revanche, la Commission européenne, saisie directement, a estimé que la question était sérieuse et a déclenché une instruction. On peut remarquer, mutatis mutandis, la parfaite analogie avec la situation en Pologne, ou le pouvoir a décidé pour convenance personnelle de mettre à la retraite d'office par un texte étrange, un tiers des juges suprêmes, président inclus. La Commission a mis en demeure la Pologne de mettre fin à ce déni de démocratie. La Pologne ayant fait la sourde oreille, la CJUE vient de rendre un arrêt en manquement qui sanctionne la violation persistante par un état des traités fondateurs de l'UE. La Pologne doit se conformer à la décision et revenir en arrière, à peine d'une sanction aggravée.
 
Anecdotiquement, l'arrêt de la CJUE rejette l'argument de la Pologne qui alléguait qu'elle n'est pas le seul pays à violer ces dispositions. On peut donc imaginer que la Commission réapplique les mêmes positions ailleurs.
 
Et puis quand un Suisse, ressortissant d'un pays traditionnellement réfractaire aux charmes de Bruxelles et de Luxembourg saisit la Commission de Bruxelles pour lui demander de saisir la cour de Luxembourg, c'est qu'il y a une bonne raison.




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Christophe Lèguevaques


Avocat au barreau de Paris - Docteur en droit


PARIS

82 rue d’Hauteville - 75010 Paris
Métro 8/9 Bonne Nouvelle


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Christophe Lèguevaques est membre-fondateur de METIS-AVOCATS AARPII - Association d’Avocats à Responsabilité Professionnelle Individuelle Inter-barreaux


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Fax. +33 (0)5 61 22 43 80